Fondé en 1961 par le Poète et Résistant, Jean-Pierre Rosnay, et animé par son fils Blaise, le Club des Poètes a pour vocation de "rendre la poésie contagieuse et inévitable" parce qu'elle est 'l'anti-polluant de l'espace mental", "le contrepoids et le contrepoison d'une existence qui tend à faire de nous des robots". Tous les soirs, du mardi au samedi, nous organisons des récitals au 30 de la rue de Bourgogne à Paris. Depuis 1996, sur Internet, vous pouvez découvrir les poètes que nous aimons, vous tenir au courant de l'agenda de nos soirées, découvrir notre podcast, communiquer avec nous et suivre au jour le jour toutes nos aventures poétiques. Bienvenue en Territoire de Poésie.
La poésie est vivante, vive la poésie.

René Depestre

Le Club
desPoètes

depuis 1961

Fondé en 1961 par Jean-Pierre Rosnay, et animé par son fils Blaise, le Club des Poètes a pour vocation de "rendre la poésie contagieuse et inévitable". Découvrez ici l'agenda de nos soirées, l'actualité de notre podcast, et une anthologie commentée des poètes que nous aimons.
30 rue de Bourgogne
75007 Paris
métro 13 Varennes

· UN POÈME · · UN POÈME ·
Fondé en 1961 par Jean-Pierre Rosnay et sa Muse et épouse, Tsou pour « rendre la poésie contagieuse et inévitable »

Du mardi au samedi
De 19h à 01h
Fermé dimanche et lundi
paris - 18 mai 2024 - page 6
histoire
René Depestre débuta son trajet poétique à Jacmel, dans l'île de Haïti. Il est issu d'une famille peu fortunée ayant juste assez pour vivre et pour permettre à leur enfant d'aller à l'école. Les jeunes années du poète sont placées sous le signe du merveilleux (à Haïti, le vaudou fait bon ménage avec le christianisme). Les arbres, la mer, et la beauté des petites cousines sont les soucis principaux d'une enfance d'où la notion de péché originel est absente. Une vie familiale harmonieuse, une vie matérielle supportable, et le merveilleux d'être au monde malgré cette misère alentour qui nuit un peu à la beauté du tableau mais pas à la vocation du poète. Il a publié son premier recueil à l'âge de 19 ans en 1946, son dernier recueil (avant le prochain) en 1994 chez Actes Sud et entre ces deux dates a bien rempli une vie de poète faite entre autres : - d'un engagement provisoire (il a été communiste, admirateur d'Aragon, ami de Nicolas Guillen et de Césaire, secrétaire de Pablo Neruda, etc ), - d'un intérêt indéniable pour les joutes érotiques (thème ensoleillé qui revient sans cesse dans ses poèmes) - d'un amour de la vie qui transparaît dans toutes ses oeuvres, aussi engagées et révoltées puissent-elles être... Depestre nous rend dans ses poèmes le quotidien merveilleux (et réciproquement). Il n'est pas un poète chercheur mais un poète qui trouve. Bref, il est, le plus naturellement du monde, poète. Sa poésie, - pétrie de sensualité, de joie, d'amour des choses et des êtres - est conçue dans une langue française des plus pures, revigorée par un bain en haute mer des Antilles.
Blaise Rosnay

A la poursuite du cheval

Quand il était adolescent
il vivait dans une ville
qui était une légende
au bord de la mer caraïbe.
Si on voulait on pouvait
se changer en n'importe quoi,
on pouvait être un arbre
qui marche et boit du rhum,
un boeuf qui joue de l'orgue
le dimanche à l'église,
un lion qui rend cocus
tous les notaires de la ville.
Lui, un soir de son adolescence
il était devenu un cheval de course,
il traversait au galop Jacmel
il hennissait et invitait les gens
à venir gambader avec lui dans la rue.
Mais portes et fenêtres restaient fermées.

Soudain une jeune fille est sortie
d'une maison de la place d'Armes :
c'était l'un des trésors de la ville,
elle était en chemise de nuit
et souriait à l'adolescent-cheval.
Quand il arriva auprès d'elle
la jeune fille quitta sa chemise
et sauta sur son dos : il galopa
galopa sans fin dans la nuit
en faisant plusieurs fois le tour de Jacmel.
Il sentait Hadriana toute nue sur son dos
comme le ciel nocturne sent les étoffes
ou comme la terre sent l'herbe au matin
il sentait sa saveur de jeune fille.
Il galopa galopa dans la nuit
avec l'étoile de Jacmel sur son dos,
avec la joie de la ville et toute la douleur
de la ville sur son dos.. Avec ses peurs et
ses haines sur son dos,
il galopa galopa dans la nuit
avec les baisers
et tous les rêves de Jacmel sur son dos.

Au petit matin ils allèrent à la mer
où ils se rafraîchirent longuement,
ensuite ils allèrent à la rivière
pour se quitter le sel du corps.
Plus tard il la déposa chez elle
sous les arbres éberlués de la place.
Quand il reprit sa forme de garçon
il avait les flancs ensanglantés,
il avait d'atroces douleurs aux épaules,
il avait très mal au cuir chevelu,
il resta deux semaines au lit
à regarder s'éloigner son adolescence
avec la plus belle fille de sa vie !