Fondé en 1961 par le Poète et Résistant, Jean-Pierre Rosnay, et animé par son fils Blaise, le Club des Poètes a pour vocation de "rendre la poésie contagieuse et inévitable" parce qu'elle est 'l'anti-polluant de l'espace mental", "le contrepoids et le contrepoison d'une existence qui tend à faire de nous des robots". Tous les soirs, du mardi au samedi, nous organisons des récitals au 30 de la rue de Bourgogne à Paris. Depuis 1996, sur Internet, vous pouvez découvrir les poètes que nous aimons, vous tenir au courant de l'agenda de nos soirées, découvrir notre podcast, communiquer avec nous et suivre au jour le jour toutes nos aventures poétiques. Bienvenue en Territoire de Poésie.
La poésie est vivante, vive la poésie.

Victor Hugo

Le Club
desPoètes

depuis 1961

Fondé en 1961 par Jean-Pierre Rosnay, et animé par son fils Blaise, le Club des Poètes a pour vocation de "rendre la poésie contagieuse et inévitable". Découvrez ici l'agenda de nos soirées, l'actualité de notre podcast, et une anthologie commentée des poètes que nous aimons.
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· UN POÈME · · UN POÈME ·
Fondé en 1961 par Jean-Pierre Rosnay et sa Muse et épouse, Tsou pour « rendre la poésie contagieuse et inévitable »

Du mardi au samedi
De 19h à 01h
Fermé dimanche et lundi
paris - 22 décembre 2024 - page 6
histoire

« Nous sommes tous les fils de Victor Hugo, qui est le frère d'Homère, d'Omar Khayyam, de Dante, de Shakespeare et de Goethe, le grand arbre de notre culture et de notre sensibilité. »

Nous sommes tous les fils de Victor Hugo, qui est le frère d'Homère, d'Omar Khâyyam, de Dante, de Shakespeare et de Goethe, le grand arbre de notre culture et de notre sensibilité.
Dès ma petite enfance, Victor Hugo joua pour moi un rôle essentiel. L'un de mes oncles, professeur de lettres à l'École Normale, qui était en voie de perdre la vue, me priait de me placer derrière son fauteuil et de lui lire des passages de ses auteurs préférés. Bien qu'il eût la délicatesse de ne point établir de hiérarchies dans ses amours littéraires ou poétiques, très vite il m'apparut que Hugo occupait une place de choix, pour ne pas dire à part, dans un univers dont cet oncle me fit partager la connaissance et la passion. Hugo, qui puise si profondément ses racines dans notre identité culturelle, est certainement l'auteur français dont la dimension universelle est la plus solidement établie. La légende, qui généralement simplifie et déforme, avec lui n'a jamais su où donner de la tête. L'abondance et la diversité du génie de Hugo et sans doute une certaine facilité à laquelle il s'abandonna quelquefois, sont des éléments qui comptèrent pour beaucoup dans les injustes et puériles tentatives de rejet dont Hugo fut victime. En son temps, j'ai été profondément choqué par la réplique d'André Gide, qui, à la question "Quel est, selon vous, le plus grand poète français ?" répondit Victor Hugo, hélas!

Où donc est le bonheur

Où donc est le bonheur ? disais-je. — Infortuné !
Le bonheur, ô mon Dieu, vous me l’avez donné.

Naître, et ne pas savoir que l’enfance éphémère,
Ruisseau de lait qui fuit sans une goutte amère,
Est l’âge du bonheur, et le plus beau moment
Que l’homme, ombre qui passe, ait sous le firmament !

Plus tard, aimer, — garder dans son cœur de jeune homme
Un nom mystérieux que jamais on ne nomme,
Glisser un mot furtif dans une tendre main,
Aspirer aux douceurs d’un ineffable hymen,
Envier l’eau qui fuit, le nuage qui vole,
Sentir son cœur se fondre au son d’une parole,
Connaître un pas qu’on aime et que jaloux on suit,
Rêver le jour, brûler et se tordre la nuit,
Pleurer surtout cet âge où sommeillent les âmes,
Toujours souffrir ; parmi tous les regards de femmes,
Tous les buissons d’avril, les feux du ciel vermeil,
Ne chercher qu’un regard, qu’une fleur, qu’un soleil !

Puis effeuiller en hâte et d’une main jalouse
Les boutons d’orangers sur le front de l’épouse ;
Tout sentir, être heureux, et pourtant, insensé
Se tourner presque en pleurs vers le malheur passé ;
Voir aux feux de midi, sans espoir qu’il renaisse,
Se faner son printemps, son matin, sa jeunesse,
Perdre l’illusion, l’espérance, et sentir
Qu’on vieillit au fardeau croissant du repentir,
Effacer de son front des taches et des rides ;
S’éprendre d’art, de vers, de voyages arides,
De cieux lointains, de mers où s’égarent nos pas ;
Redemander cet âge où l’on ne dormait pas ;
Se dire qu’on était bien malheureux, bien triste,
Bien fou, que maintenant on respire, on existe,
Et, plus vieux de dix ans, s’enfermer tout un jour
Pour relire avec pleurs quelques lettres d’amour !

Vieillir enfin, vieillir ! comme des fleurs fanées
Voir blanchir nos cheveux et tomber nos années,
Rappeler notre enfance et nos beaux jours flétris,
Boire le reste amer de ces parfums aigris,
Être sage, et railler l’amant et le poète,
Et, lorsque nous touchons à la tombe muette,
Suivre en les rappelant d’un œil mouillé de pleurs
Nos enfants qui déjà sont tournés vers les leurs !

Ainsi l’homme, ô mon Dieu ! marche toujours plus sombre
Du berceau qui rayonne au sépulcre plein d’ombre.
C’est donc avoir vécu ! c’est donc avoir été !
Dans la joie et l’amour et la félicité
C’est avoir eu sa part ! et se plaindre est folie.
Voilà de quel nectar la coupe était remplie !

Hélas ! naître pour vivre en désirant la mort !
Grandir en regrettant l’enfance où le cœur dort,
Vieillir en regrettant la jeunesse ravie,
Mourir en regrettant la vieillesse et la vie !

Où donc est le bonheur, disais-je ? — Infortuné !
Le bonheur, ô mon Dieu, vous me l’avez donné !