C'est en 1967, dans le cadre des émissions poétiques que je produisais et animais à la radio (France Inter) et à la télévision (première chaîne) que je fis découvrir au public français Ana Blandiana. Cette jeune poétesse roumaine était d'ailleurs peu connue de ses compatriotes, à l'exception d'un microcosme d'initiés.Elle faisait partie d'une délégation de poètes qui me fut présentée par le sympathique ambassadeur de Roumanie à Paris de l'époque, entré en dissidence peu de temps après. Etait-elle communiste je l'ignore, n'ayant, à tort ou à raison, jamais accordé la priorité à ce critère. Mais ce qui me parut certain, c'est qu'"on" s'employa, sinon à la réduire au silence, du moins à la tenir à l'écart. Pour ma part, l'émotion et le choc que me provoquèrent la lecture de ses poèmes, me rappela qu'Anna de
Noailles, qui jadis tant m'avait séduit, était aussi d'origine roumaine. J'offris à Ana Blandiana sa première publication en français dans l'Anthologie du Club des Poètes, publiée en 1976. En 1978, lorsque j'ai créé le Premier Festival International de Poésie de Paris, pour le compte duquel mon équipe et moi avons reçu, durant un mois, et présenté à un très nombreux public, ainsi qu'à la presse écrite et audiovisuelle nationale et internationale, des poètes venus de 37 pays, j'eus le privilège de célébrer Ana Blandiana comme une des grandes voix poétiques d'une époque tourmentée, où le meilleur côtoie le pire.