- Yasmine
Bourhane, France, 5 février 2000
Ce n'est
qu'un tout petit mensonge
Dans la grande histoire de mon amour
La beauté
de ton âme est gravée
Sur la fresque des jours bénis
Suspendue dans l'éternité
Il y
a tant que je voulais te donner
Tant te montrer
Mais
l'amour porte plus avant sur les chemins du bon vouloir
Plus loin vers les contrées où les contraires se
découvrent lorsqu'ils se croisent
Je troquerai
contre toujours plus de sel
mon costume élimé, mes casseroles et les caillots qui
coulent dans mon sang
Avec
ces quelques grains déjà la mer donnera plus de sa musique
Le vent livrera son secret plus dense au silence du désert
La peur dépouillée de ses craintes avec courage
lèvera le front devant la pacifique nudité des choses
Le coutelas
du regard rouille au contact du sourire
La pierre au sein de la douleur s'effrite sous la douceur
Le crime se fige quand on le regarde droit dans les yeux
Du métal
fondu, de la poussière noire, des larmes de la délivrance
S'élèveront des temples éphémères
où le repos de l'âme
trouvera les forces d'aller combattre encore l'amnésie des
hommes
Chacune
de vos douleurs portent un nom dans mon coeur
J'ai
pleuré ton enfant
J'ai mal au dos que tu as, courbé
J'ai planté le couteau de la trahison
Menti par avidité
Volé ce qui était à toi
Flirté avec la mort et frôlé le désespoir
J'ai
aimé un autre qui n'était que moi
Pour
solde de tous comptes
Une somme qui n'a la valeur d'aucune importance
Une somme qui ne rachète rien
Mais qui donne son prix à l'essentiel de nos chances
Ce n'est
qu'un petit mensonge dans la grande histoire de l'amour
Il n'y
a que faire des miroirs quand je nous vois dans le ciel qui nous contemple
Il y a encore à se rappeler les noms de l'insouciance
A reconnaître la gravité qui passe en ombres brèves
sur nos quarts d'heure de vérité
Etre
est tant et peu de choses et qui ne dureront
Dissipons
nos nuages
- Jean-Rémy
Fleuret, France, le 4 janvier 2001
Les soirs dabandon, à lheure lumineuse des derniers
reflets du jour, je veux vivre encore ces quelques instants rares
où seul avec moi-même jécoute me parler
dune certaine nostalgie dun certain temps passé
où la jeunesse nous emmenait vers des terres inconnues, vers
des êtres dexception qui nous donnaient leur amitié
et leurs paroles portaient en elles suffisamment de mots forts et
leur accueil de chaleur que nos curs se trouvaient comme réchauffés
et nous avions limpression que leurs regards avaient en eux
comme une étincelle particulière.
Nous
étions jeunes et poètes tout à la fois et la
rumeur du monde ne nous atteignait pas encore!
- Marie
Brisson, France, le 4 janvier 2001
Observant
ces humains
- en
apparence si raffinés
en apparence si exigeants
dans leur quête de beauté -
anéantir
dun unique mot
lespoir exprimé
Jai
compris
Toute
quête de beauté
peut aussi laisser place à la monstruosité
Je choisis
Je préfère
moccuper de linfiniment petit
quest la vie.
- Roseau,
Afrique du Sud, le 3 février 2001
Quand au creux du Poème
on se cache, on attend,
on découvre des choses
inattendues
Quand
on prolonge
cette attente cachée,
on se trouve porté
dans l'inconnu
où pourtant
l'on était attendu
Qui dira
ce qui s'y passe ?
Au creux
du rocher,
le silence pose un doigt
sur la bouche
- Isabelle
de Penfentenyo-Barrett, Hong Kong, le 3 février 2001
De ce
côté du fleuve
De ce côté du fleuve, les jupes tournent, les yeux senvolent,
les bouches scellent leurs aveux sur les lèvres gourmandes,
les pas senchaînent et se déchaînent.
De lautre côté, on ne voit presque rien : lombre
dun chêne nu, quelques silhouettes qui dansent sans musique
et sans sourire, suivent le courant, comme noyés dans lécume
des mots baillonnés et sourds.
Ici,
je croyais que lherbe humide nous servirait de lit
Là, tes pieds nont trouvé que la boue, elle sent
déjà la mort.
Les narcisses
nont plus de reflet dans leau qui va trop vite
Mais moi je cueille ton printemps caché sous la neige presque
fondue
Il est
trop tôt pour les papillons, rentre ton filet
Trop tard pour les punaises, réfugiées près du
feu
Je garderai les cendres pour protéger ma terre, jétendrai
le drap gris pour mûrir à labri des dernières
gelées, qui tuent sous le diamant de leurs angles précieux.
Je serai ta saison, et nous irons ensemble danser du bon côté
du fleuve.
Elles voleront les cendres, elles danseront dans lair en dessinant
des boucles sous nos souffles brûlants.Cest le feu de
ta bouche qui embrase ma langue, et je
couve des braises que tu devras éteindre.
Le fleuve
ny suffira pas. Locéan non plus.Donne-moi quelques
larmes, apaise ma brûlure, soulève ce jupon où
se cache ma pudeur, sous la croûte des cendres durcies découvre
enfin mes tremblements de corps, mes failles éruptives, mes
coulées de lave incandescente enfermées par le sort
que le ciel ma jeté, laisse monter ce magma rougeoyant
qui dira ma colère et se répandra sur tes flancs endormis
au prix de mille
cicatrices.
Sur le versant sud de notre île à peine sortie des entrailles
de lenfer, les narcisses fleuriront, les chênes se vêtiront,
les papillons viendront frôler les doigts des amoureux qui danseront
à la Saint Jean .
De ce
côté du fleuve, la vie bourgeonne encore, mes mots dansent
pour toi, caracolent au bord de leau où jabreuve
leur soif dun reflet darc-en-ciel .
De ce côté du fleuve, un chemin de halage pour oublier
la hâte qui ternit nos errances, pour sapprocher de leau,
plus près, oublier lautre rive, perdue dans la mangrove
de nos incertitudes ; viens, dansons de ce côté du fleuve.
- Julien
Santenoy, France, le 2 février 2001
Narcisse
en hiver
Sur un étang recouvert de glace
Le fils dun Prince contemple son image
Debout sur la fragilité des eaux
Il se regarde de haut
Il subodore
que les mystères de leau profonde
En savent plus que la surface où il se mire
Limage est trouble, encombrée de scories
Cest lui même si ce nest pas lui.
De tout
son poids il penche sur la glace
Pour en déchiffrer le savoir
Et il sait bien quil ne se trouvera
Que lorsque son image disparaîtra.
«
Le printemps viendra » souffle le vent qui passe
« et en te perdant, tu te trouveras ».
- Jozef
Bakou, Allemagne, le 2 février 2001
Gribouillis denfants
Petits nez
petites bouches
et de grands yeux pétillants.
Machines
questionneuses
qui ne cessent de te demander
le Pourquoi de choses graves
que tu ignores.
Gribouillis
denfants
dont tu essayes de saisir le sens.
Quelquefois
nous nous perdons dans le quartier
et nous ne savons plus rebrousser chemin.
Dautres fois nous nous oublions à jouer dehors
alors quil pleut à torrent.
Il arrive
même,
ailleurs,
après la guerre,
que des objets
ramassés dans la rue
nous explosent entre les mains
- Pascal
Agneray, France, le 2 février 2001
L'INSTANT
X
Quand
loin des yeux mondains un flash au cur m'isole,
Toujours plus haut, d'ici où nul ne me console,
Qu'un vif éclair, son or, s'insinue dans mon être
Ainsi qu'un soleil puissant pénètre dans la mer,
Quand le silence usant de sa ferveur muette
Eveille par degrés la muse du poète,
Dont la lyre accordée fredonne sa chanson
Au plus secret de ma raison,
Alors vibre dans l'âme, où mon esprit s'enchaîne,
Ce qui circule hors de mes veines :
Je sors de ma cervelle un songe merveilleux,
Tissé de tous ces mots mystérieux
Qui recouvrent la vie d'espaces plus dociles
Et la mort d'un néant moins vil ;
Je capte à ton passage, esprit si singulier,
Tous tes échos particuliers,
Des sons paranormaux qui l'un dans l'autre ébruitent
D'anciens souvenirs en fuite.
-
Mathieu
Berger, sur le chemin, le 2 février 2001
Bonsoir
Club des Poètes
Jai découvert la poésie par hasard. Le hasard
; cest vous !
Depuis deux ans dès que mes pérégrinations me
mènent à un accès internet, je viens . Jai
beaucoup voyagé et chacun des moments
passés sur lun de vos sites était comparable à
ceux que lon passe autour du feu, la nuit, quelque soit lendroit
du monde.
Je rentre très bientôt à Paris. Je viendrai vous
voir, promis. Mais avant je voulais vous remercier dêtre
là. Féliciter léquipe technique qui à
crée et qui anime votre site. Saluer les poètes du monde
entier défunts ou « bien vivants » que jai
pu lire grâce à vous.
Un hommage un peu particulier (si vous voulez bien le transmettre
!) à Marie Brisson dont japprécie particulièrement
les textes et les poèmes. Sa dernière lettre est vibrante.
Il y a beaucoup de force et de délicatesse en même temps.
Seul un lieu comme le votre pouvait laccueillir.
Comment se procurer des publications
de vos poètes les plus fidèles ?
A bientôt sous le ciel de Paris. Je ne lai pas vu depuis
si longtemps, comment est-il ?
-
Dorothée
Kopp, France, le 1er février 2001
la petite
fille d'en face
La petite fille d'en face chasse les ombres
de son épée en plastique
ses cheveux noirs en vol de corbeaux
tissent la nuit de leurs reflets sombres
et je tombe
dans une gueule béante
aux crocs d'ivoire et de suie
qui salive des torrents de pluie
et ceint mes jambes nues
de sa longue queue d'asphalte.
- Guerbas
Abdelkader, Algérie, le 1er février 2001
Je ne
sais comment vous remercier d'avoir penser à tous ceux qui
sont mordus par l'amour de la poésie et surtout française.
Je suis enseignat dans lycée où la langue française
est un perpétuel combat mais où le fruit de ce combat
reste doux quand, malgré les obstacles, des élèves
s'expriment graçe à la poésie et en français.
S'exprimer en français pour eux et pour nous (j'habite un village
de l'intérieur du pays) est la seul façon de déjouer
le piège des tabous que véhiculent la langue arabe mélée
à une mentalité de piérre même si l'Arabe
est une langue de poésie par excéllence.
Enfin
j'ai trouvé un espace où je pourrais m'exprimer sans
avoir à subir les préjugés des gens ou la peur
des mots puisque le mot dans nos pays est un délit plus grave
que ...
S.V.P. pourrais-je vous envoyer les productions de mes élèves
et dois-je les corriger avant de les envoyer ou les laisser telles
qu'elles ont été écrites pour que vous puissier
avoir une idée sur leur vrai niveau en langue française.
Merci au nom de tous les mots qui ne peuvent voir le jour à
cause d'une idéologie, d'un dogme ou tout bêtement à
cause d'une chaise qu'on veut garder à tout prix.
- Ginette
Desmarais, Canada, le 31 janvier 2001
FOI
Insoutenable
fugue désherbée mais riche
l'orgue des pierres dévale mes racines carrées
il fallait
y penser
que le
bonheur se disloque parfois dans un crépuscule de
fer
je laisse tomber des mots que ta voix commande
pour prédire la fin en nous
l'inspiration
drapée qui tombe
te perce d'étoiles et personne n'a rien vu
toi seul te dissous dans le coeur des autres
n'oublie
jamais la petite note
quand les pirogues glissent sur les miroirs
la poésie des prédateurs rode
nous partons à cheval pour des années-lumière
les espions du réel vautrés dans ton assiette
triompent au concours de la mesquinerie
mais
toi
tu te
convoques pour l'imposture sublime
la poudre aux yeux, la fosse d'orchestre
la vitesse souple des croisières de joie
donner, donner
qu'importent les cendres
du premier
sourire jusqu'au dernier
voilà ta vie
- Patrick
Devaux, Belgique, le 31 janvier 2001
porte
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doucement
la porte
d'entrée
perd
les ombres
la nuit
retrouve
son silence
d'attache
ne subsiste
alors
aux charnières
que
le bruissement huileux
de l'encre