Nota
Bene : Tous les messages et poèmes sont lus chaque jour par
nous et
mis en ligne ici, avant la sélection hebdomadaire que vous
lirez ci-après.
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RESSACS, mercredi 18 mai 2005 par Benjamin
Menasce
Ressacs
1. Je connais tous les tortueux désirs de
l'histoire de ma chair
Jusqu'au millionième fragment de son moindre instant
Angles fermés
Ancestrales fragrances
Anxiogènes
Je connais les genèses et les histoires imaginaires
Mes généalogies enchantées et mystérieuses
Les arcanes fantasmagoriques
Stupéfiantes Spirituelles
De mes passés cellulaires
L'architectonique de ce sang
Cette viande ce muscle ce gras
Cette peau sa chaleur son battement
Sa moiteur son odeur
Forme surdéterminée
Silencieuse
Absconse
Je connais aussi la ténébreuse
histoire de ma peur
Jusqu'aux plus profonds tréfonds des
aveugles catéchismes de la terreur
Vu l'horreur
Ses stigmates ses signatures
Antiques et rituelles
Odoriférantes De pourriture et de mort
et de sanglot et de morne
2.
J'ai vérifié
Je reconnais les ponts et les horizons démesurés
des souvenances acharnées de ces désirs
Je reconnais la compagnie solitaire de mon
fantôme
Seul grimaçant dans la furie du vent
Malgré
Les défragmentations de son être
Après
La dispersion
Irrésolue
Son murmure
Son ultime souffle
Perdu dans un désert
Sans mesure
Je revois encore
Les crépuscules enfermés dans
Les tiroirs de nos légendes
Des tombeaux poussiéreux
Nos pensées caverneuses
3.
O ces soupirs gymnopédiques !
O ces rivières de souvenirs !
Ces récits tracés au scalpel
De l'âpre âme ramassée
Ressassée
Massacrée
Enfin
Au repos
Dormir
Rêver
Evanaissance
Réminiscence
Volutes
Distance : droites aveugles
Dans le vide
Vite
Devant
La métempsycose
Et la spirale
De l'infinie
Absence
4.
J'ai éprouvé ces ténèbres
et leurs doubles
Des piliers des échos de tristesses
Quelques paillettes de nuit
Filamenteuses flammèches
O Cette geste cette fable ironique
Son indigente sagesse
(debout, sombre le regard en dedans, sous un porche
dégoulinant de pluie sale et furieuse, l'eau polluée
jaune et vieille et opaque et sale et brillante, la rue allongée,
tapissée d'huile et de goudron et de crasse et d'essence
et de cœurs dégorgés, des alchimies soupirées,
cette homélie, son illisible virage, des guenilles de fleurs,
durées grises et harmonieuses de l'hiver, qui frappe, qui
sourdement grésille, arrive, revient et repart, salue les
ports romantiques d'Armorique et les vagues, les raides et les émouvantes,
ces caresses lointaines, promesses d'ivresses, puis le temps des
exodes, des fuites, de l'errance et des charniers, mille retours
impossibles, mille inexorables exils loin de ces terres hostiles,
déraciné, l'étranger en ses terres étrangement
étrangères, s'enraciner, ne serait-ce qu'une fois
encore, rien qu'une, dans les sols toxiques d'un autre ailleurs,
dans les réseaux déroutés de la débâcle,
s'entenaille et s'incline, décline, se courbe enfin aveugle
ne voyant plus que la croûte torturée sous ses pieds
de la planète, perché ce vieillard insouciant qui
contemple l'intérieur de ses paupières, les ombres
chinoises grimaçant le monde, son avenir périmé)
La conscience décantée
En perles de verre éparpillées
Dans le cristal impur d'un slogan effacé
Acre ! C'est l'amer qui triomphe !
La lâche victoire !
L'esprit ravagé de chagrin
Permanent crachin perçant de l'hiver
Se couche se couvre et s'endort
Inerte
5.
Océaniquement vivant
Par delà les orages et les typhons
Outrages du temps
Inexorablement
Je demeure
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La porte des secrets, mercredi 18 mai 2005
par Said Salem
Derrière ces murs du silence
Une voix s'élève
En cri d'amour et d'espoir :
« ouvrez-moi cette porte
au chant des nostalgies
la magie des métaphores
sur le bleu des horizons
à marcher sur l'abîme
sombre des flots
courtiser les muses et les sirènes
jusqu'au palissement des étoiles
partager les secrets
d'un cœur amoureux
en ce vitrail transparent
bâti en temple sacré
où les enfants bénits du ciel
prient ce culte de beauté
dont le cristal des âmes nobles
est sculpté en momie de notre idéal
c'est la porte intime des secrets
celle de paix et liberté
que seul le coeur peut ouvrir ou fermer.
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Sans titre, mercredi 18 mai 2005 par Séverine
Orgie primaire des éléments
convulsifs.
Le grand pion géant croisait sur une
étoile.
L'homme, si petit, regardait ébahi
Les pieds célestes de la divine apparition.
Ses deux mains moites, attachées au
baton
Enfoncé dans la terre...
Il les a lancées dans le ciel sibyllin.
Si haut, qu'elles sont restées collées
à
La divine plante des pieds.
Et depuis ce temps là,
L'homme regarde tristement par terre.
Il cache ses moignons dans ses poches,
Il ne sait plus rien faire...
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Bouquet d'ecchymoses, mercredi 18 mai 2005
par Carla L.
Des roses bleues parsèment mon cœur,
Bouquet d'ecchymoses enchâssées,
Dont le parfum se nomme douleur,
Dont la volupté est fanée
***
Dans ce terreau de mes noirceurs,
Les fleurs sont faites de papier,
Guirlandes de doutes et de langueurs,
Dont les pétales sont froissés.
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LA VILLE TAMBOUR, mercredi 18 mai 2005 par
Séverine
La ville tambour
S'écrasait sous votre rancoeur,
Mais toujours elle repoussait
Dans vos yeux et dans vos coeurs.
Le mariage informe
Jamais commencé
Et pourtant consommé
Pourrissait au fond de vos têtes.
Le grand calme de la misère
Enfantait vos querelles mortes.
Et vous, assommés sous les mots insipides,
Vous marchiez le coeur dans les rigoles.
Le sang de vos annnées brumeuses
Stagnait au fond de vos poches.
Parfois une main rouge s'échappait,
Alors vos yeux enfiévrés
Brûlaient la chair,
Et même la mort...
Le grand cri fragile
Emmuré dans vos poitrines
Condamnait celui qui avait osé !
Car la ville tambour vous avait pour amants,
Car la ville tambour vous avait pour esclaves.
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Le murmure des aïeux, mercredi 18 mai
2005 par José Lagorce
Où est l'homme au regard d'infini
Moiré, l'or sous les paupières,
Le visage aux mille rivières,
L'âme au corps unie ?
Pour toute richesse, les perles ruisselant
Le long du delta de ses yeux,
Lorsque le vent chargé d'ans
Porte en lui le murmure des aïeux.
Posées là, ses racines aux dunes
s'accrochent,
Avançant dans le temps au rythme de
la roche
Le passé l'enlace et le vêt,
L'avenir dans ses rets,
Il soulève du présent la poussière
Encore nacrée d'hiers.
L'ombre bleue en chaque grain
S'immisce sous ses pas,
Murmures des tombes vains,
Pour celui qui déjà s'en va.
Au creux de ses mains se pose des étoiles
atones,
Tel le dernier présent du temps à
son automne.
Ses genoux enfouis, il est levé.
Le temps rattrape et avale
L'homme obstiné
A l'âme pâle.
Où est l'homme au regard d'infini
Moiré, l'or sous les paupières,
Le visage aux mille rivières,
L'âme au corps unie ?
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Lacs urbains, mercredi 18 mai 2005 par José
Lagorce
Je peins le bonheur sur les brumes matinales,
Paysages éphémères qui
vers les cieux s'élèvent,
N'aimant le soleil qu'aux premières
lueurs de l'aube,
Lorsque les pensées, à la fine
toile liées,
N'osent encore contempler l'éclat du
présent.
Je peins la brume, souvenir posthume.
Le monde apparaît en sa clarté
naissante.
Nul miracle, simple poursuite de vies,
Corps tourmentés par la valse des sentiments,
Ames aiguisées sur la roue du présent
Qui sans cesse engage dans l'hier
Les bonheurs d'instants muets en prières.
Sous la voûte de pierre résonnent
les murmures
Des êtres — esprits croyants —
qui posent l'avenir
Sur les vents d'un soupir
Et que la vie emmure.
Regards en reflet à la surface des
lacs
Où l'eau se morfond dans le calme hivernal,
Attendant que s'ouvrent les terres et dans
les profondeurs abyssales
S'engouffrer en une plainte élégiaque.
Les larmes convenues des soirs d'orage,
Les armes factices des jours de révolte,
Et dans les cratères de la rue, la
rage
D'une foule que le vent exhorte.
Les brumes s'affalent sur les pavés
luisants,
Etalant les couleurs de mes espoirs défunts,
Troublant la quiétude des eaux endormies
De lacs urbains d'âmes emplis.
En fines gouttelettes l'aimée se répand
Aux crevasses des paupières d'une rue
Eveillée. Les pas des chalands
D'elles chargés, sèchent au
soleil écru.
Où donc va la brume,
Lourde d'humaine amertume ?
- Sans Titre, mardi 17 mai 2005 par Séverine
LES CROIX PENCHEES
La horde fabuleuse
De nos dieux à cinq sous
Se repaît lentement
Du silence sacré.
Les murailles tremblent
Quand ils ouvrent leurs bouches,
Les pavés dérivent
Au gré de leur souffle.
La nuit entité
Sommeille aux creux des autels
Et cachent leurs plaies sirupeuses.
Les croix penchées rient et tombent.
Les crucifix de plâtre
Se brisent sur les dalles.
Le bedeau sans bras ni jambes
Met cent ans pour les recoller
Et mille pour les racrocher.
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Ligne imaginaire, mardi 17 mai 2005 par
Dimitris P. Kraniotis
Fumées
des cigarettes
et tasses
pleines de café,
à côté
de la ligne imaginaire,
sur laquelle la vitesse
des mots
s' appuie
et envoie un signal
à mon silence blessé.
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Je vais je ne sais où... , dimanche
15 mai 2005 par Laudith
Je vais d'un pas léger sur ce nouveau
chemin
J'aime aller partout pour arriver à
rien
Au gré de mon humeur douce ou tantôt
violente
Rien qu'une promenade virant en déferlante
Le regard loin devant ivre de sensations
En voulant maîtriser les milliers d'émotions
Qui alors se déchaînent en orage
intérieur
Pour enfiévrer mon âme et me
glacer le cœur
Mes lèvres ont un sourire des larmes
sont dans mes yeux
Un soleil rouge embrase de feu mes longs cheveux
Alors je ralentis m'arrête juste un
instant
Je ferme mes paupières pour écouter
le vent
Chanter à mon oreille une douce complainte
Dans laquelle je retrouve mes peurs et mes
craintes
Je n'ose me retourner derrière moi
est mon ombre
Qui me suit pas à pas mon Dieu comme
elle est sombre
Sur ce ruban de route qui s'ouvre de nouveau
J'aperçois des visages et je les trouve
beaux
Je jette enfin mon voile pour alors profiter
Des moments de bonheur que j'avais occultés
Et m'accorde enfin le droit de dire oui
Pour goûter pleinement à ma nouvelle
vie
Ainsi fuir à jamais mes éternels
combats
Je vais je ne sais où mais j'y vais
à grands pas
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QUELLE JOURNEE !, le mercredi 11 mai 2005
par Joseph Rzemien
Un perdreau rouge égaré
arpente élégant la grève
de l'allée
dans la mousse une pluie de diamants
joue à l'été
avec des airs de monument
dans la rue saupoudrée de blanc
le jumbo noir d'un corbeau
vient d'atterrir
ensoleillé dans la charmille
un merle danse
en habit de gaieté
par cette journée d'été
dans l'hiver attardée
sur un fond
de maisons dans l'ombre
la viorne allume
des houppes d'audace
des magies étoilées
le bonheur aujourd'hui
prend son bain de lumière
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Sans titre, le mardi 10 mai 2005 par Romel
Crèvecoeur (Haiti)
tu as toujours connu ce côté
de la mer
plus discret qu'un matin loin de la ville
toujours hante ce murmure dans les feuilles
le ciel frais de ta présence est un
refuge sûre
le ciel frêle de mon oubli ne se souvient
que de toi
et mon visage n'aura pas change
sous sa chair calme comme nous deux
tu n'ignores pas la moralité du jour
et quand je t'attends à la lisière
de ma lenteur
tu viens toujours de ce côté
de la mer
plus vieux que mon amour
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Sans titre, le mardi 10 mai 2005 par ilan
Pauvre petite
Petite fille perdue
Perdue dans ces palais
Ces cabarets criards
Ciels où les filles de joie par soucis
de vertu
guettent des anges une impossible mutinerie.
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Pertinence , lundi 9 mai 2005 par Sellatvn
Pertinence
Toi la porte et l'appel
les fleurs d'Arménie et la chute sans
fin au berceau de soie
toi la vitre et la buée
l'extérieure sondé à
ma poitrine
et tous les rires du jour.
J'avale à pas rapides les nuits de flaques
étalées sur le sol.
Sur le perron de platane, sur le grand perron
brun des feuilles mâchées par l'été,
les cimes des bûchers rigolent d'une
saison qui n'en finit plus.
La caravane renverse la route,
et les hommes se roulent par terre,
les femmes se roulent par terre,
avec l'ironie des cailloux et la mousse récoltée.
Toi la grande battisse aux ramures d'enfants
la clairière au milieu
le champs fier de colza
l'aubépine et le printemps
les poings et la lutte
tous les matins au rebord des yeux.
Les rivières auront beau tarir
ma soif étanchée sous les poutres
de bois.
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Le voyage, lundi 2 mai 2005 par Jemde
Les plus grands capitaines
Gagnent les horizons
En quittant ce qu'ils sont
Pour aller vers eux-mêmes
Et les plus belles routes
Vers les horizons calmes
Mènent l'homme qui parle
A celui qui écoute.
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