L'entière
humanité dans un seul homme
Saint-Pol Roux
par Michel Décaudin
Lorsque
je voulus lire dans leur intégralité Les Reposoirs de la
Procession (c'était bien avant la réédition que nous
en a donné Rougerie), je ne trouvai le deuxième tome, La
Rose et les Épines du Chemin, qu'à la bibliothèque
de l'Arsenal, et les pages du volume qui me fut communiqué n'étaient
pas coupées. Il était ainsi resté en rayon plus de
cinquante ans sans être consulté. Le fait est, hélas, significatif. Il faut bien en convenir, Saint-Pol-Roux, telle la langue grecque au Moyen-Age, existe mais on ne le lit pas. Il partage avec quelques autres poètes de son temps cette malédiction d'être devenu une figure à laquelle on se réfère avec quelques anecdotes et quelques citations, toujours les mêmes, ce qui dispense de le bien connaître, voire de le seulement connaître. Or, on peut lire Saint-Pol-Roux aujourd'hui. S'il est vrai que La Dame à la Faulx n'a jamais été rééditée dans sa version originale, (faudra-t-il attendre son centenaire, dans quelques années, pour le voir reparaître?), combien de textes sont maintenant à notre disposition, en premier lieu cette Répoétique, qui devait être son grand oeuvre! Grâce à eux, nous percevons un poète autrement magnifique que celui dont le symbolisme avec Gourmont et le Surréalisme avec la manifestation de 1925 ont avec une singulière convergence offert une représentation réductrice et trompeuse. A la fois celui qui, comme Claudel, pense que le poète continue Dieu et que la poésie n'est que le renouveau de l'archaïque pensée divine, et celui qui, avec Apollinaire, souhaite aller à l'avenir comme on vient du passé. Poète de la création éternelle et de la passagère modernité, l'entière humanité dans un seul homme. Michel Décaudin |
Saint-Pol-Roux est mort en 1940, maltraité par les nazis, après qu'ils aient violée sa fille Divine et brulé ses manuscrits. |
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