D'un fruit qu'on laisse pourrir à terre, il peut encore sortir un nouvel arbre. De cet arbre, des fruits nouveaux par centaines. Mais si le poème est un fruit, le poète
n'est pas un arbre. Il vous demande de prendre ses paroles et de les manger
sur-le-champ. Car il ne peut, à lui tout seul, produire son fruit.
Il faut être deux pour faire un poème. Celui qui parle est
le père, celui qui écoute est la mère, le poème
est leur enfant. Le poème qui n'est pas écouté est
une semence perdue. Ou encore : celui qui parle est la mère, le
poème est l'oeuf et celui qui écoute est fécondateur
de l'oeuf. Le poème qui n'est pas écouté devient
un oeuf pourri. |
René
Daumal
(Le Contre-Ciel,
Pour
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